28 octobre
Départ pour les Canaries… et première « grande » navigation pour notre équipage : 460 milles à parcourir, soit environ 4 jours de mer (en tablant raisonnablement sur une moyenne de 5 nœuds (c’est à dire 5 milles/heure), et donc environ 120 milles/24 heures).
Tous coincés depuis plusieurs jours dans le port, nous quittons Rabat en patrouille de 5 catas. Demain ce sont 18 monocoques qui partiront de concert. Arrêt obligé au ponton de la douane et de la police pour achever les formalités administratives … et signer une décharge de responsabilité pour les autorités portuaires : ils n’estiment toujours pas les conditions favorables pour sortir en mer. Nous signons donc tous, en espérant quand même ne pas faire une grosse bêtise. Les pilotes du port nous accompagneront dans le chenal et leur présence est rassurante.
Comme pour l’arrivée nous avons droit à une nouvelle visite de Boris, la caricature de chien de la brigade cynophile, le Rantanplan local : jeune labrador dressé à la recherche d’explosif, il est surtout très fort à la recherche de miam miam… et pour laisser ses poils partout sur (et dans !) le bateau. Difficile de rester sérieux avec cet hurluberlu sur pattes et les enfants s’en donnent à cœur joie pour le détourner de sa mission. Tout cela ne fait pas très sérieux…
Dès que la marée est haute, les premiers bateaux quittent le ponton de la capitainerie. A distance, les mouvements d’oscillation de leurs mâts sont impressionnants et laissent présager de grosses grosses vagues dans le passage étroit des digues… Nous retrouvons les pilotes de la marina au pied des murailles de la casbah et attendons la bonne séquence de vagues pour passer à notre tour. A leur signal nous nous élançons, sans une certaine émotion. C’est la foire du Trône !
Puis nous retrouvons la mer. La houle de travers nous surprend un peu après ces quelques jours au port et les enfants ont vite sommeil. Le vent que nous attendions de Nord-Nord Est est finalement plein Sud, donc en plein de face… Moteur, moteur, moteur… Et plus de pilote automatique : il est inversé de quasiment 180 degrés ! Mystère… et galère si on doit barrer 24h/24 pendant 4 jours… Après enquête, c’est l’ampli de guitare de Théophile, posé à proximité du gyroscope, qui perturbe l’instrument !! Le problème est donc vite réglé, il suffit de déplacer le bazar.
En début de soirée le vent n’a toujours pas tourné et une looonngguuueee houle assomme un peu tous les équipages . On est heureux d’être là, vraiment. Petits farceurs de fichiers météo !
Alors que le jour décroît franchement , on aperçoit un des bateaux-copains en galère : ils se sont pris dans un filet dérivant. Tant que nous ne sommes pas assez éloignés des côtes, c’est un problème récurrent. Ces filets, même signalés par une petite bouée rouge clignotante, sont la calamité des bateaux : on ne les voit qu’au dernier moment et il est souvent trop tard pour manœuvrer. Pris dans les hélices ou les safrans, ils obligent souvent les capitaines à plonger pour aller bricoler sous le bateau (pas un truc de fille tout ça). Et quand l’eau est à 15, qu’il fait nuit et qu’il y a des vagues… les capitaines regrettent souvent de ne pas pouvoir envoyer leurs femmes sans que leur image en prenne un méchant coup… Et leurs femmes leur en sont tellement reconnaissantes !
La nuit est particulièrement noire et nous veillons donc avec application : postés avec Théophile sur la poutre avant, nous scrutons la surface de l’eau à la lampe torche. Des heures à faire l’ascenseur dans les vagues (et dans le noir total..). Parfois des bateaux de pêche s’approchent et nous guident dans leur labyrinte. Sinon, inch’allah. Le diner consiste en un pauvre bol de pâtes, englouti sans relâcher la veille. Les conditions de vie se dégradent franchement sur ce rafiot.! Mais la méthode est efficace : nous passons sur un filet, on hurle et Manu a juste le temps de mettre les moteurs au point mort. On retient notre respiration mais le filet glisse sous la coque sans rien accrocher. Ouf. Tout le monde n’aura pas la même chance dans notre « flotille ».
Vers minuit nous sommes suffisamment éloignés de la côte marocaine pour nous permettre un peu de relâchement. Le ciel sans lune nous offre toutes ses étoiles, je me laisse absorber par la nuit et mes pensées
29 octobre
Le vent est toujours de sud, donc toujours de face… donc toujours le doux ronron du moteur… La mer est un peu plus tranquille et les enfants arrivent à peu près à travailler. Mais difficile de les motiver, ils ne pensent qu’à pêcher et jouer aux légos. La prise d’une magnifique dorade coryphène satisfait quelque temps leur instinct de chasseur mais relance illico les discussions techniques sur les leurres (qu’ils fabriquent maintenant eux même avec des morceaux de cordages), les lignes, les façons d’achever ces pauv’ bêtes… et tutti quanti. Même Juliette a attrapé le virus.
Un cormoran un peu neuneu n’arrête pas de plonger comme un idiot sur les leurres : il se prend à l’hameçon, surfe accroché à la ligne mais arrive heureusement chaque fois à se libérer. On dirait qu’il fait du ski nautique, c’est très drôle.
Le vent commence à tourner en fin de journée et à minuit on coupe enfin les moteurs. Le bonheur ! En revanche la houle qui s’était assagie se gonfle de nouveau à l’arrivée de la nuit (c’est dommage…) mais le rythme des vagues est plus ample et moins fatigant. La lune affiche un pâle quartier quelques heures mais a vite fait de retourner se coucher. Comme je la comprend.
30 octobre
Nous sommes toujours ballotés et secoués. Une très longue, très large et très haute houle (6 mètres au moins) nous donne la sensation de naviguer au milieu de collines mouvantes. C’est tout à fait étonnant mais pas désagréable. Le problème est la petite houle bien cassante qui se superpose… Les enfants travaillent un peu dedans, un peu dehors, un peu pas beaucoup, marquant des pauses régulières pour « recaler les gyros ». Il semblerait que la seule activité parfaitement adaptée aux grosses vagues soit les légos… Les caisses ont envahi le carré, difficile de jouer dans les cabines avec les mouvements désordonnés du bateau.
3 dorades coryphènes se prennent dans nos lignes, on passe en mode « pêche industrielle ».
On commence à trouver un semblant de rythme de quarts pour s’occuper à la fois de la nav, du bateau et des enfants, tout en récupérant quelques heures de sommeil de ci de là.
La nuit tombe à nouveau bien noire, on ne voit même pas la mer. Mais finalement ce n’est pas si mal : à en juger au bruit impressionnant de certaines vagues qui tapent contre le bateau, elles doivent être jolies tout plein et je préfère encore ne pas les voir…
Un croisement de cargo un peu compliqué anime mon quart pendant 45 min : il change constamment de cap et l’AIS ne cesse de m’annoncer une route de collision, quels que soient les changements de cap (et empannages de génois !) que j’entreprends. Pourquoi ça tombe toujours sur moi, les galères nocturnes ??
31 octobre
La mer reste agitée et de travers, c’est lassant. Ca bouge, ca tape, on a du mal à faire un pas devant l’autre sans se tenir. Vague sensation de gueule de bois, mais sans le côté fiesta qui va avec… Pour couronner le tout, le vent tombe dans la journée et il faut se résoudre à remettre un peu de moteur. On traine notre misère…
Petite opération « crêpes du dimanche » pour remonter le moral des troupes. Inutile d’étaler la pâte dans la poële, roulis et tangage combinés suffisent à faire le plus gros du boulot !
On avance tranquillement : l’atterrissage est prévu demain matin sur Graciosa, inutile d’accélérer pour se retrouver à jeter l’ancre de nuit dans un mouillage que l’on ne connaît pas.
Coucou la petite famille,
Je viens enfin d’avoir l’adresse de votre Blog et de prendre le temps de le lire. Merci beaucoup, de nous faire voyager avec vous, en vrai régal. Enfant j’ai habité 3 ans à Rabat et 1 an à Tanger, et j’ai reconnu dans tes récits, les rues, l’ambiance, ça m’a fait comme la madeleine de Proust…..
Je vois que les enfants vont très bien, et que même si les cours du cned, sont durs pour eux (et par conséquence pour les mamans aussi) il ne faut pas négliger qu’ils vivent une merveilleuse école de la vie, qu’ils ne trouveront jamais dans les livres, mais qui leurs servira surement dans leurs vie.
J’espère que le mauvais temps qui est chez nous, ne vous concerne pas, déjà que ce n’est pas marrant en mer je n’ose l’imaginer en mer …..
bisous à tous Nathalie et compagnie.
Et moi je fais la Transat Jacques Vabres sur VirtualRegatta, ça compte non? Bravo et bon vent.
Ca bougeait à Perols aussi ces quelques jours (tempête de …plusieurs jours! !!! ) On a pense fortement à vous !! enfin, la maison est (presque) enfin amenagee !!! c’est bôô !!!!
si vous avez le temps ……………pensez à ma petie boîte !!!! Lol
Je vous embrasse tres tres fort !
Tatou
nous sommes impatients de voir des photos de cette jolie maison ! Et impatients aussi d’ouvrir les boites… mais on attendait un grand et méchant moment de solitude. Comme ça tarde un peu à venir (pourvu que ça dure !), je crois que nous allons bientôt craquer .. Plein d’affectueux baisers
BIEN RECU VOTRE DERNIER RECIT MARITIME .NOUS POUVONS CONSTATER QUE LA NAVIGATION EST DIFFICILE PAR CE MAUVAIS TEMPS .BRAVO POUR VOTRE COURAGE POUR CETTE AVENTURE. ICI, A BOUZIGUES NOUS AVONS DU MAUVAIS TEMPS DEPUIS PLUSIEURS JOURS : ALERTE ORANGE ET MEME ROUGE POUR LES CRUES DES FLEUVES ET RIVIERES . BONNE CONTINUATION POUR LA SUITE ET BON VENT !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
AMITIES JOEL ET MARTINE
Bon début de pêche, mais un peu rock’n roll quand même ! en ce samedi 5 vous êtes sans doute arrivés…Bonne escale Michel de Bouzigues
P.S.: les amplis de guitare comportent un aimant très puissant apte à influer sur tout ce qui est capteur magnétique !
On aime pas rester trop longtemps sans nouvelles… sans compter que votre dernière balise dit que vous êtes partis loin, loin en Afrique !!! curieux ? vous aurait-on volé la balise ???
Vu le mail que je viens de lire, les conditions se sont améliorées et c’est tant mieux, vous allez pouvoir récupérer… on attend avec impatience la mise à jour du blog…
Gros bisous
Ce matin, ici, il pleut. Mais ma journée sera belle car tu viens d’y mettre du soleil.
Ce qui est génial avec toi, Isa, c’est que même dans les galères, tu ne perds pas ton humour. Tu mets du piquant dans toutes les situations. On te lit avec délectation.
C’est pourquoi il est aisé de comprendre que plusieurs jours sans ta prose nous laissent sur notre faim.
Ce matin, ici, il pleut. Mais ma journée sera belle car tu viens d’y mettre un beau soleil. MERCI
Bonsoir la petite famille zanzibarienne!!
Comme vous êtes courageux! J’ai ri l’épisode du cormoran neuneu!!
Ici la météo n’est pas brillante non plus, pluie et pluie et pluie et pluie etc…. pluie!!
De l’eau partout mais point de bateau dans mon Vaucluse ce sont nos voitures qui vont flotter si cela continue!!
Les garçons désespèrent dans leur cata à Sète qui lui est sous l’eau mais pas sur l’eau!!!!
Ils ont la connaissance d’une famille du cata ZUELA celui qui était à côté du votre! Eux ils ont 3 enfants, 2 garçons et une fille! Leur petit dernier (4a) est adorable, il m’a emmené voir les oursins et a appris à Stef pour pêcher avec!!
Eux ils doivent partir à la fin du mois pour 6 mois mais me souviens plus quoi comme tour!
Je pense que je ne descendrai pas à Sète ce week-end, pas la peine de prendre des risques sur la route avec cette pluie abondante! Ce matin, je ne voyais pas à 2 mètres pour aller bosser!!
J’ai horreur de cette pluie mais bon c’est ainsi on va faire avec! Vais cocooner dans ma tite maison bleue moi mes aventures je les vis à travers votre blog en attendant de les vivre au travers du blog de mon fils qui s’impatiente de ne pas partir!! Il ronge son frein!!!!
Voilà les tites nes de la maman de Stef!
J’espère que vous allez avoir meilleur temps aux Canaries!!
Je vous embrasse et allez haut les coeurs moussaillons!
Vous êtes formidables!!
Maman de Stef